Il fait nuit, il est tard, je m’emmerde. J’étais sorti car je voulais me changer les idées, oublier un peu mon quotidien, fuir la réalité et boire un bon coup. Mais finalement, je m’ennuie et je n’arrive pas à l’oublier, lui. Il m’énerve à hanter toutes mes pensées, même après une dispute. Car oui, si j’ai fuis ici, ce soir, c’était parce que je voulais surtout l’oublier lui, juste une soirée. Mais je n’y arrive pas… Il reste là, dans ma tête et je me repasse en boucle toutes ses paroles, ses cris… Ses pleurs. En réalité, je ne suis qu’un gros con, je l’ai fait pleurer. Lui, qui ne se laisse jamais aller, j’ai réussi à le faire pleurer. Alors c’est que j’ai été un vrai connard.

Je me redresse et glisse la paille de ma boisson alcoolisé dans ma bouche. L’alcool me brûle la gorge et l’estomac mais justement, j’aime bien cette sensation. Je me retourne légèrement pour observer les gens, plus ou moins dans un bon état, danser sur la piste de danse. Ils sont tous en train de s’amuser et je mentirai si je disais que je n’avais pas envie d’aller les rejoindre. Je ferme quelques secondes mes yeux, toutes les lumières me donnent mal à la tête et avec l’alcool que je continu de siroter, ça n’arrange absolument rien.

Sinon, que faire ? Je crois que je vais payer ma boisson et m’en aller parce que je n’ai rien à faire. Mais je n’irai pas m’excuser auprès de lui. Parce que je ne suis pas le seul fautif et je tiens à ma fierté. C’est aussi de sa faute à être aussi têtu ! A vouloir tout contrôler, tout faire à la perfection. Mais ça, je ne peux pas vraiment lui en vouloir non plus, sauf que sur le coup, ça m’a grave énervé. Et on s’est pris la tête. Je ne me rappelle plus de mes paroles, juste que j’ai sûrement été blessant.

Alors que j’allais poser mon verre et payer, quelque chose ou plutôt, quelqu’un me retient par le bras. Je me retourne vers cette personne inconnue, une fille, assez jolie je dois l’avouer. Mais elle ne m’intéresse pas. Moi, j’ai l’air de l’intéresser à mort en tout cas, car elle s’accroche assez fortement à moi après avoir posé un billet à côté de mon verre. Tant mieux si elle me le paye. Sauf que je n’ai pas envie de m’amuser avec elle. Je lui souris et récupère rapidement mon bras alors qu’elle était en train de baver. Je m’éloigne tout en lui faisant un clin d’œil. J'aime ça... faire de l'effet.

Alors que je m’en allais tranquillement et avec classe, j’entends mon prénom. J’entends mon prénom, mais j’entends également cette voix. Sa voix. Je la reconnais, la plus belle voix que je n’ai jamais entendue, la sienne. Je me tourne vers lui et le regarde avec surprise…

Je suis totalement surprit, choqué de le voir ici. Je pensais qu’il serait au dortoir, à attendre dans la chambre et à se défouler sur Starcraft. C’est ce qu’il fait lorsqu’il veut évacuer sa colère, il tue tous les ennemis et boss cachés, je le vénère pour ça. Je n’ai jamais pigé son jeu.

Cette situation est embarrassante, vraiment. Moi qui d’habitude, sais toujours comment réagir, là, j’avoue que je suis à court d’idées, d’excuses et tout ça. Je me mords la lèvre inférieure, il va être encore plus énervé, je le sais. Il va être triste aussi et m’en vouloir pour un temps indéterminé. Je me gratte un peu la nuque avant de reprendre un peu d’assurance et de lui tendre ma main. C’est à lui de choisir, soit il me suit, soit il refuse de se lever et de venir prendre ma main, dans ce cas là… Je n’aurai plus qu’à partir et j’espère vraiment qu’il ne va pas refuser. Il ne peut pas.

Même lui ne me résiste pas.

Je le vois hésiter, je sais qu’il est en train de se battre mentalement avec lui-même pour ne pas accepter. Parce qu’il passerait pour le plus faible et il déteste qu’on puisse le voir ainsi. Pourtant, ce n’est que la pure et simple vérité, il est plus faible que moi et c’est bien pour ça que j’aime le protéger. D’accord, hier soir, j’ai fait une connerie en appuyant là où ça faisait mal. En parlant de ses parents qu’il n’aime pas vraiment, en parlant de son enfance. Je suis stupide, je sais, mais c’était sorti tout seul vu que j’étais énervé.

Je lui lance un regard désolé. Aller, lève-toi ! Viens prendre ma main merde ! S’il ne réagit pas dans deux minutes, je m’en irai. Et ce n’est pas comme si j’avais envie. Cette fois, je veux bien mettre ma fierté de côté et m’excuser. Je ne le fais jamais mais lui, il le vaut bien.

Je le vois bien, il sait qu’il est en faute et tant mieux. Il ne sait plus où se mettre, il se gratte la nuque. Tiens, ça faisait longtemps que je ne l’avais pas vu aussi embarrassé. La dernière fois qu’il l’avait été, ça avait aussi été à cause de moi.

Il me tend soudainement sa main, m’invitant à me lever pour le rejoindre et aller je ne sais où. Non. Juste, non. Je ne peux pas le rejoindre comme ça. Ce serait trop facile, n’est-ce-pas ? Et je le connais bien, il en profitera plus tard pour m’emmerder, je hais lorsqu’il fait ça.

Je le regarde, mais je ne bouge pas d’un poil. Je ne sais absolument pas ce que je dois faire, je pèse le pour et le contre, j’hésite. Je me lève doucement, pour me rasseoir tout de suite après, par peur de regretter mon geste. Je n’aime pas avoir à choisir pour ce genre de chose, il le sait, il a encore joué de ses connaissances !

Par pitié, pas ce regard désolé, tu sais bien que je ne peux y résister. Tu n’es vraiment qu’un sale connard Heechul, vraiment, je te déteste. Tu me fais ressentir trop plein de choses que je n’aimerai pas ressentir. Du moins, pas avec toi car au fond, ça me fait souffrir aussi. Sauf que je te connais depuis toujours, alors j’ai fini par avoir l’habitude. Ce qui ne signifie pas que je n’en ai pas marre de tout ça !

Je soupire puis je me décide enfin à me lever. Mais ce n’est pas pour aller prendre sa main, je le bouscule lorsque je passe à côté de lui, pour lui faire comprendre que ce n’est pas parce que j’ai cédé cette fois que je ne lui en veux plus. Je suis certain qu’il sourit maintenant, d’un sourire victorieux débile. Que j’aimerai bien lui arracher.

Je fonce droit devant moi, je marche rapidement vers l’endroit le plus proche et le plus calme de cette boite de nuit : les toilettes. Si, vraiment. Et je sais qu’il me suit.

Lorsque j’entre dans les toilettes, j’avance jusqu’au fond de celles-ci puis m’arrête. Je ne me retourne pas car je ne veux pas lui faire face, pas encore. Je suis toujours vexé et super énervé, encore plus maintenant que je l’ai trouvé ici. J’essaye tout de même de me calmer car j’ai l’impression d’être un gamin qui boude. Et je n’aime absolument pas donner cette image.

J’entends la porte se refermer, sa respiration arrive à parvenir jusqu’à mes oreilles et j’entends également ses pas. Il s’approche de moi, je ne sais pas ce qu’il va faire mais peu importe, je ne ferai pas le premier pas. Je sens soudainement des bras m’entourer, m’emprisonner. Il ose faire ça ? Je n’aurai jamais dû lui laisser l’occasion d’apprendre à me connaitre car maintenant qu’il me connait par cœur… Il en profite bien. Quelle stupide idée sérieusement.

Il continu de me serrer contre lui… Ses bras m’apportent de la chaleur, son étreinte est agréable mais ça, je ne lui dirai jamais, plutôt mourir. Sa douce respiration qui frappe mon cou va me rendre dingue. Je me détends malgré moi, j’aime ça malgré moi. Il attend que je prenne la parole ?

- Qu’est-ce que tu fais ici ?

Oui, c’est la seule question que j’ai réussi à sortir… Question stupide car je connais bien la réponse, il est venu faire la même chose que moi. On voulait s’oublier, mais je vois que ce n’est pas possible. Mais j’aimerai qu’il me le dise, je ne devrai pas le savoir ou le deviner. J’ai envie de l’entendre me dire ça. Mais est-ce qu’il va le faire ? Ou il va encore changer de sujet… ou me répondre quelque chose de faux… ?

- Tu m’énerves.

Je me suis senti obligé de lui dire. C’était plus fort que moi… Il le sait très bien, qu’il m’énerve mais il n’aime pas l’entendre. Je lui ai juste fait comprendre mon état.

Il attend quelques secondes puis finit enfin par me demander quelque chose.

« Qu’est-ce que tu fais ici ? »

C’est tout ? Je m’attendais sincèrement à une autre question. Je m’attendais à ce qu’il m’engueule comme jamais mais il m’a juste demandé ça, calmement. Qu’est-ce que tu attends de moi Kyuhyun ? Je te connais bien, presque… non, je te connais par cœur mais je ne peux pas toujours lire dans tes pensées, imbécile. Et cette fois, j’aimerai beaucoup pouvoir le faire. J’aimerai pouvoir te répondre ce que tu veux entendre, pour ne pas te vexer à nouveau.

« Tu m’énerves. »

Ca y est, il me l’a dit… Je le sais bien ça. Je t’énerve tellement que tu as sûrement envie de me foutre ton poing dans ma jolie face. Je ris doucement, c’est plus fort que moi. Je ne suis pas amusé, c’est un rire nerveux car je ne sais pas trop quoi lui répondre.

- Pour répondre à ta question… Je suis ici car… J’avais envie de passer du bon temps. Je voulais oublier notre dispute d’hier soir, et t’oublier toi espèce de gamin. Mais j’y arrive pas et en plus toi aussi, tu es ici. Je suppose que tu voulais également m’oublier, hein ?

Je ne crois pas en Dieu, et toutes ces conneries mais je prie là. Oui, je prie ! J’espère avoir bien répondu, j’espère qu’il ne va pas se retourner pour me tuer. Parce que lui, lorsqu’il est en colère, il peut faire peur aussi, bien que ça ne m’impressionne pas vraiment mais quand il frappe, ça fait mal tout de même. Et ça l’amuse de me taper, il sait qu’il n’a pas trop le droit, je suis un mannequin, on ne doit pas toucher à mon visage. Sauf que lui, il s’en fiche totalement de ma gueule.

- Je sais que tu es énervé. Et que c’est de ma faute. Alors je… m’excuse.

Je l’ai fait ! Je me suis excusé. C’est bizarre, je me sens assez gêné, je ne m’excuse jamais. Mais qu’est-ce qu’il me fait faire lui ?