Un bruit strident retentit dans mes oreilles. Rhaaaa, maudit réveil qui se dérègle tout le temps ! J'avais pourtant mis "It's not me" des Beast pour me réveiller en douceur ! L'esprit encore embrumé, je tâtonnai à la recherche de mon portable. Mes doigts rencontrèrent une surface plane et froide. Bizarre, je n'avais pas de table en verre dans ma chambre. J'ouvris les yeux en grimaçant face au viol auditif qu'accomplissait avec soin cette sonnerie horrible et me figeai.
A première vue, je n'étais pas dans ma chambre. Mon cerveau qui se remettait en marche avec difficulté me permit de reconnaître la salle commune. Puis peu à peu les images firent sens. Je n'arrivais pas à dormir, alors j'étais venue ici pour composer les paroles d'une mélodie qui me trottait en tête depuis plusieurs jours. Mais apparemment l'attraction exercée par le canapé ultra-moelleux avait été trop difficile à contrer.
Bien, je savais où j'étais et ce que je faisais là. Mais ça ne me disait toujours pas pourquoi ma sympathique petite sonnerie s'était changée en horrible alarme qui ressemblait étrangement à une alerte inc... Je me levai aussitôt. Ce n'était pas mon portable, mais une véritable alarme incendie qui résonnait à mes oreilles. Il y avait un feu dans l'établissement ? Je regardai rapidement autour de moi mais rien n'avait changé. Je savais qu'en cas d'incendie l'alarme se déclenchait dans tous les bâtiments, aussi je n'avais à première vue aucun moyen de savoir dans quelle partie de l'établissement se trouvait le foyer.
Je me redressai, tentant de garder mon calme. Je n'étais pas en danger dans l'immédiat mais il se pouvait très bien que les flammes se propagent par ici, dans ce cas je ferais pas long feu, si je peux me permettre le jeu de mot quelque peu morbide. J'attrapai mon sac et me dirigeai vers la porte. La chose la plus raisonnable était encore de me diriger vers la sortie pour me mettre à l'abri à l'extérieur, et tenter ensuite de retrouver le reste des élèves. Je hochai vigoureusement la tête pour calmer la montée d'adrénaline que je sentais poindre.
En théorie, je devais prendre le couloir qui longeait la cafétéria en direction des salles de cours pour rattraper l'escalier menant à l'escalier principal qui donnait sur la cour. Je me dirigeai donc dans cette direction mais l'angoisse me serrait le ventre. Je n'étais pas spécialement peureuse, mais je détestai ne pas savoir où se trouvait le danger. A tout moment, le plafond pouvait s'effondrer, un mur s'écrouler ou le plancher craquer sous la chaleur des flammes. J'avançai avec précaution, mais un crépitement encore ténu me parvint aux oreilles. Il allait en augmentant, ce qui n'était de toute évidence pas de très bonne augure pour ma quête de la sortie. Je poussai une porte coupe-feu et eus aussitôt un mouvement de recul sous la bouffée de chaleur qui m'envahit.
Un peu plus loin sur la droite se trouvait le couloir menant à l'escalier. Mais il n'était visiblement pas en option que j'emprunte cette route. Les flammes avaient déjà envahi le plancher et léchaient avec vigueur les murs et le plafond. La fumée s'envolait en gros volutes noirs et envahissait l'espace où je me trouvais à présent. Je me mis à tousser violemment et mis ma main devant mes yeux qui pleuraient sous le picotement des particules brûlantes flottant dans les airs. Je me réfugiai derrière la porte pour reprendre mon souffle. Bon, je pouvais faire une croix sur l'escalier principal. Mais ce n'était pas la seule sortie de l'établissement. Il y avait une porte arrière donnant sur le parc. En temps normal elle était fermée pendant la nuit, mais dans l'immédiat c'était la sortie qui me semblait la plus proche. Cependant pour y accéder je devais traverser le rideau de flammes pour continuer droit devant moi et rejoindre un autre escalier.
J'inspirai profondément pour me donner du courage. D'après ce que j'avais pu voir, le feu n'avait pas encore complètement barré le couloir, mais je devais faire vite. J'attrapai le foulard que je portais autour du cou et l'attachai sur mon crâne pour couvrir mon nez et ma bouche. Le tissu était fin et ne résisterait pas longtemps, mais il m'éviterait un minimum de m'étouffer au passage critique. Je comptai lentement jusqu'à dix puis poussai la porte et me précipitai dans le brasier. Comme je l'avais vu, il restait encore un petit espace vierge de flammes au bord du mur, et en passant suffisamment vite je parvins à éviter les dégâts majeurs. La fumée m'aveugla cependant en un instant et je dus me jeter contre le mur opposé pour être un instant à l'abri, derrière le coin que formait l'infirmerie.
Je me laissai tomber au sol, prise d'une quinte de toux particulièrement violente. J'avais chaud, je ne voyais plus rien et ma poitrine me brûlait. Je devais partir d'ici, me relever, faire quelque chose. Mais la peur et la douleur me clouaient au sol. Je sentis des larmes rouler le long de mes joues brûlantes et je me recroquevillai au sol.
Lève-toi. Lève-toi, bordel, ou tu vas y passer ! DEBOUT !
Les deux mains au mur, je me forçai à reprendre le contrôle de mon corps et me levai lentement. Mais au moment où je m'apprêtais à faire un pas, j'entendis ce qui me sembla être une voix étouffée. Je tournai la tête et m'approchai au plus près du couloir en flammes. J'entendis alors plus distinctement une voix qui hurlait :
- Il y a quelqu'un ? S'il vous plaît ! Au secours !